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vendredi 19 décembre 2014

Je ne crois que ce que je vois

L'auteur de "La parole humiliée" nourrit actuellement mes réflexions sur le rapport entre la parole et l'image

« Je ne crois que ce que je vois » : une objection à la foi chrétienne aussi ancienne que l’Évangile, inaugurée par l'un des douze, un disciple un tantinet pessimiste qui a, je dois dire, toute ma tendresse : Thomas.

Voir, donc. L’histoire biblique nous montre pourtant que si la vue interpelle, elle ne suffit jamais : « Tu as cru parce que tu as vu. Heureux ceux qui croiront sans avoir vu » dira Jésus à Thomas, déplaçant ainsi son attention de la vue pour l’amener à la foi. Or, la foi, nous dit Hébreux 11.1, « est une ferme assurance des choses qu’on espère, une démonstration de celles qu’on ne voit pas », et cette foi « vient de ce qu'on entend, et ce qu'on entend vient de la parole de Christ. » (Romains 10.17)

Laissons-nous surprendre : Dieu créé... par sa Parole !


« Au commencement était la Parole », nous dit Jean au tout début de son évangile. Pourquoi la Parole ? Pourquoi Dieu n'a-t-il pas créé, disons, par sa vue ? On aurait pu lire : « Dieu vit la lumière, et la lumière fut », mais non. C’est bien la Parole qui est créatrice, et cette Parole est omniprésente :
- Au début, dès le chapitre 1 de la Genèse : « Dieu dit : que la lumière soit ! Et la lumière fut ».
- À la fin, dernier chapitre de l'Apocalypse : « Si quelqu’un retranche quelque chose des paroles du livre de cette prophétie, Dieu retranchera sa part de l’arbre de la vie » (Apo. 22.19)
- Et, bien sûr, au milieu : la Parole de Dieu devient chair et vient habiter parmi nous (Jean 1.14). C'est l'incarnation de la Parole en Jésus-Christ.

Dans cette Parole divine, nous dit Jean, "se trouve la vie, et la vie est la lumière des hommes". Puis il nous fait toucher le nœud du problème : « la lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue. » (Jean 1.5). Voilà où se situe le drame : la Parole brille, mais la Parole n’est pas reçue. Et il nous faut la recevoir.

La Parole reçue (Jean 1.5-11)

Cette idée de Parole reçue, n'est-elle pas frappante ? Bien sûr, Jean ici fait référence au fait que Jésus était le Messie attendu par les juifs et qu’il n’a pas été reçu par les siens. Mais quand même. S’il y a bien des chrétiens qui se targuent d’être le peuple de la « Parole de Dieu », ce sont bien les protestants : sola scriptura : l’écriture seule, c’est le cri de la Réforme !

Parce que la Réforme a remis la Parole de Dieu a sa juste place, elle a effectivement fait des protestants le peuple de la Parole. La Parole est venue chez nous. Et pourtant on peut s'interroger : nous qui vivons 5 siècles après Luther, avons-nous vraiment reçu la Parole ? Continuons-nous de la recevoir chaque jour, dans une lecture et une méditation quotidienne ? Est-on attaché à cette Parole, nous en nourrissons-nous ? Ou bien, tellement happé par nos tâches quotidiennes, l’avons-nous mise de côté, remis notre lecture à plus tard ? Avons-nous finalement cru que nous la connaissions suffisamment et que nous avions des choses plus urgentes à faire ?

Quoi qu’il en soit, dans la Parole se trouve la vie, et la vie est la lumière des hommes. Cette Parole, il nous faut la recevoir non seulement pour trouver la vie et voir le chemin illuminé, mais aussi parce qu’il nous incombe de la transmettre. La vie et la lumière ne se trouvent ni dans les plus beaux moments de fraternité vécus en église, ni dans une évangélisation à tout rompre, ni dans une louange à dévisser les ampoules. Elle se trouve dans la Parole de Dieu.

La Parole, puissance de Dieu (Jean 1.12-18)

La vie et la lumière se trouve dans la Parole de Dieu, parce que « à tous ceux qui l’ont reçue, à ceux qui croient en son nom, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, lesquels sont nés, non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu. » (Jean 1.12)
Cette Parole nous transforme et donne à celui qui la reçoit le pouvoir de devenir enfant de Dieu. Cette Parole reçue, c’est celle qui nous dit : J'en prends aujourd'hui à témoin contre vous le ciel et la terre: j'ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie, afin que tu vives, toi et ta postérité, pour aimer l'Éternel, ton Dieu, pour obéir à sa voix, et pour t'attacher à lui: car de cela dépendent ta vie et la prolongation de tes jours. (Deutéronome 30.19-20).

Est enfant de Dieu celui qui reçoit la Parole de Dieu et la met en pratique. Non pas qu’il y ait quelque œuvre bonne à accomplir pour mériter sa place d’enfant de Dieu, mais plutôt que celui qui reçoit du Père son adoption va agir en fils. Celui-là a compris que la Parole du Père est plus digne de confiance que la sienne propre, que les pensées du Père sont plus fiables que celles des hommes. C'est la foi qu'il nous faut avoir parce que, bien sûr, sans la foi la Parole ne nous sert à rien. C'est la douloureuse expérience du peuple d'Israël dans le désert : « La parole qui leur fut annoncée ne leur servit de rien, parce qu'elle ne trouva pas de la foi chez ceux qui l'entendirent. » (Hébreux 4.2).
Il nous faut donc non seulement accueillir la Parole, mais encore l’accueillir avec foi. Alors la Parole prendra autorité sur notre vie, et notre vie changera.

En guise de conclusion, à toi qui, dans ce monde envahi par l’image - image qui supplante peu à peu la parole - à toi donc qui veux voir Dieu, je te dis que l'évangile a une réponse fantastique à t'apporter : tu n'as pas besoin de voir Dieu pour croire. Définitivement, tu n'as pas besoin. Parce que pour croire, nul n'est besoin de voir : il faut entendre.

Entends-tu la voix de Dieu qui te parle au cœur ?

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Source photo Ellul : cliquez ici

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